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dimanche 15 février 2009

Le don de Gabriel : Hanif Kureishi


Le don de Gabriel
Hanif Kureishi
Traduction Mona de Pracontal
Editeur 10/18 domaine étranger, numéro 3571
Format 11 cm x 18 cm
ISBN 2264036427
7,41 euros

Fils prodige !

Pur produit de l’Angleterre multiraciale, à l’instar de Kashuo Ishiguro, Zadie Smith ou encore Monica Ali, Hanif Kureishi est né en 1954, d’un père pakistanais et d’une mère anglaise. Ses premiers romans, Le Boudha de banlieue, Black Album, ses scénarios pour Stephen Frears (My beautiful Laundrette, Sammy et Rosie s’envoient en l’air) décrivent sans manichéisme et avec beaucoup d’humour des immigrants quelque peu paumés, en quête d’identité. H. Kureishi avoue pourtant dans Souvenirs et divagations, sa récente autobiographie ne pas se retrouver dans l’image « d’immigrant de la seconde génération, pris entre deux cultures » qui lui colle à la peau. Pour se débarrasser de l’étiquette, il choisit alors de varier ses sources d’inspiration
Le sexe et la passion amoureuse, déjà très présents, se retrouvent donc thèmes de prédilection d’œuvres ultérieures comme Intimité, (adapté à l’écran par Patrice Chéreau), ou La lune en plein jour. La critique dithyrambique des débuts se fait, sans doute à raison, plus acerbe. C’est trop cru, trop personnel !
Le Don de Gabriel marque une nouvelle étape et explore de façon tendre et caustique les relations parents/enfants, et plus précisément la relation père/fils. Si le sujet n’est là encore pas nouveau dans l’œuvre de Kureishi, il devient la pierre angulaire du roman.
Au départ, la situation n’est pas rose pour Gabriel, quinze ans, qui assiste impuissant à la séparation de ses parents. Christine, fatiguée de voir Rex, son compagnon, ressasser un passé glorieux mais bien révolu le met brutalement à la porte.
Infantile et fantasque, Rex, guitariste dans les années 70 de Lester Jones, célèbre rock star n’accepte en effet toujours pas d’être brutalement passé du strass à l’anonymat. Se réfugiant dans un taudis, il continue à penser que travailler constituerait une insulte à son génie. De son côté, Christine multiplie les amourettes stériles.
Gabriel va donc s’employer à restaurer l’harmonie perdue, alliant habilement les rôles de conseiller et d’entremetteur face à des parents immatures !
Ce sera son cadeau, son don. Premier sens de Gabriel’s Gift, titre original du roman qui joue sur la polysémie comme le fait sa traduction en français.
Quant au second sens de gift/don, Gabriel l’illustre à merveille. Le véritable artiste de la famille, pétri de sensibilité et de talent, c’est lui.
H. Kureishi associe joliment réalisme et surnaturel (les œuvres qui prennent vie au sens propre ou la présence tangible d’Archie, le jumeau de Gabriel, mort lorsqu’ils étaient tout petits par exemple) livrant au passage une réflexion intéressante sur l’art et la création.
Il réussit également sa galerie de personnages secondaires.
Au petit jeu du roman à clé, on devine rapidement qui se cache derrière l’androgyne et flamboyant Lester. Détail amusant, David Bowie est en fait à l’origine du Don de Gabriel, ayant demandé à H. Kureishi d’écrire un livre pour enfants qu’il pourrait ensuite illustrer. Le résultat est un livre pour adultes, hommage sans réserve à l’illustre artiste !
Nouvelle preuve, s’il en était besoin, que l’art ne se commande pas et que l’œuvre évolue au gré de l’imagination de son créateur.
Sans conteste, le lecteur se délecte donc une fois de plus du don d’Hanif !

(Mis en ligne le 01/12/2003 sur parutions.com)

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